Après la fête, ma belle-mère m’a remerciée… mais rien n’a changé entre ma belle-sœur et moi
« Tu comptes vraiment sortir comme ça ? » La voix de Camille résonne dans le couloir, tranchante comme une lame. Je serre les dents devant le miroir de l’entrée, ajustant une dernière fois mon rouge à lèvres. Ma robe est simple, noire, élégante, mais je sais déjà qu’à côté d’elle, je passerai pour une ombre. Camille, c’est la reine des ongles parfaits, des cheveux brushés, des talons vertigineux. Moi, je préfère la discrétion, un vernis nude et des baskets blanches. Mais ce soir, impossible d’échapper à la fête d’anniversaire de mon beau-père : toute la famille est réunie dans la maison de mes beaux-parents à Tours.
Dès que j’entre dans le salon, je sens les regards peser sur moi. Ma belle-mère, Françoise, s’approche avec son sourire figé. « Ah, vous voilà ! Les deux plus belles-filles du monde ! » Elle nous embrasse toutes les deux, mais je sens que son regard glisse plus longtemps sur Camille. Mon mari, Julien, discute déjà avec son frère Thomas près du buffet. Je me dirige vers la cuisine pour aider à sortir les plats.
Camille me suit. « Tu as vu le gâteau ? J’ai passé deux heures chez le pâtissier pour qu’il soit parfait. » Elle soupire en inspectant ses ongles impeccables. « J’espère que ta salade plaira… » Je ravale ma réponse. Ce n’est pas la première fois qu’elle me fait sentir que je ne suis pas à la hauteur. Depuis que j’ai épousé Julien, il y a trois ans, tout est devenu compétition : qui a la plus belle manucure, qui porte la robe la plus chère, qui offre le cadeau le plus original à nos beaux-parents.
La soirée avance dans un ballet de sourires forcés et de compliments polis. Les invités rient, trinquent, mais je sens la tension entre Camille et moi comme une corde tendue prête à rompre. Au moment du dessert, Françoise prend la parole : « Je voulais remercier mes deux belles-filles pour tout ce qu’elles ont fait ce soir. Sans vous, rien n’aurait été possible ! » Les invités applaudissent. Camille me lance un regard en coin et murmure : « Tu vois ? On fait équipe finalement… » Mais je sais qu’elle ne le pense pas.
Après le repas, alors que tout le monde discute dans le jardin illuminé de guirlandes, je m’assois seule sur une chaise longue. J’entends les rires de Camille et de ses amies près de la piscine. Elles parlent vernis semi-permanent et extensions de cils. Je me sens étrangère à leur monde. Mon téléphone vibre : un message de ma sœur, Pauline. « Ça va ? Tu tiens le coup ? » Je souris tristement. Pauline vit à Lyon et me manque terriblement. Elle seule comprend ce que je ressens dans cette famille où tout semble se jouer sur les apparences.
Julien me rejoint. Il pose sa main sur mon épaule. « Ça va ? Tu as l’air ailleurs… » Je hoche la tête sans répondre. Comment lui expliquer que je me sens invisible ? Que chaque sourire échangé avec Camille est une bataille silencieuse ? Que même les remerciements de sa mère sonnent faux à mes oreilles ?
Plus tard dans la soirée, alors que les invités commencent à partir, Françoise vient vers moi dans la cuisine où je range les assiettes. « Merci encore pour ta salade, c’était délicieux. Tu sais… j’aimerais que tu sois un peu plus… comment dire… présente ? Comme Camille. Elle s’implique tellement dans la famille… » Je sens mes joues brûler de honte et de colère mêlées. « Je fais de mon mieux… » Elle me tapote la main et s’éloigne.
Je reste seule quelques minutes, les mains tremblantes. J’entends Camille rire avec Thomas dans le salon. J’aimerais crier que tout cela n’est qu’une mascarade, que derrière ses ongles parfaits et ses sourires éclatants se cache une femme aussi perdue que moi.
En rentrant chez nous avec Julien cette nuit-là, je regarde par la fenêtre les lumières de la ville défiler. Il me prend la main : « Tu sais que je t’aime comme tu es ? Tu n’as pas besoin d’être comme Camille ou de plaire à ma mère… » Je souris faiblement. Mais au fond de moi, une question tourne en boucle : pourquoi faut-il toujours choisir entre être soi-même et être acceptée ?
Le lendemain matin, Camille m’envoie un message : « On fait les boutiques samedi ? J’ai vu une nouvelle manucure tendance… » Je soupire. Peut-être qu’un jour on arrivera à se comprendre au-delà des apparences. Peut-être pas.
Est-ce qu’on peut vraiment être soi-même dans une famille qui ne voit que ce qu’on montre ? Ou faut-il apprendre à jouer un rôle pour être aimée ? Qu’en pensez-vous ?