« Il m’a arraché deux burgers de l’assiette : Mon mari pense que je dois maigrir » – Mon cri du cœur après huit ans de mariage

« Tu ne crois pas que ça suffit, trois burgers ? »

La voix d’Antoine a claqué dans la cuisine comme un coup de tonnerre. J’étais là, debout devant la table, mon assiette à la main, les enfants déjà installés autour de moi. J’ai senti le rouge me monter aux joues. Je n’ai rien dit, j’ai juste posé mon assiette, essayant d’ignorer le regard curieux de Bobby et le froncement de sourcils de Ruby. Lily babillait dans sa chaise haute, inconsciente de la tension qui venait de s’installer.

Antoine s’est approché, a pris deux des trois burgers que je venais de me servir et les a reposés sur le plat. « Tu n’as pas besoin de tout ça, Claire. Tu sais très bien que tu devrais faire attention. »

J’ai senti mon cœur se serrer. Huit ans de mariage, trois enfants, et il me parlait comme à une gamine prise la main dans le sac. J’ai voulu protester, mais les mots sont restés coincés dans ma gorge. J’ai croisé le regard de Bobby, inquiet. Il a murmuré : « Maman, t’as pas faim ? »

Je me suis forcée à sourire. « Si, mon chéri. » Mais la vérité, c’est que j’avais faim. Faim de nourriture, oui, mais surtout faim de respect, d’écoute, d’un peu de douceur dans cette vie qui ne m’appartient plus vraiment.

Depuis la naissance de Lily, je suis devenue une ombre dans cette maison. Je passe mes journées à courir : préparer les petits-déjeuners, changer les couches, faire les lessives, aider Ruby à écrire ses lettres, calmer Bobby quand il fait une crise parce qu’il ne veut pas aller à l’école. Antoine rentre tard du travail, fatigué, et moi je n’existe plus qu’à travers ce que je fais pour eux.

Le soir, quand tout le monde est enfin couché, je m’assois sur le canapé et je regarde mon reflet dans la vitre du salon. Mes hanches se sont élargies, mes bras sont moins fermes qu’avant. Mais je suis là, debout, vivante. Pourquoi est-ce que ça ne suffit pas ?

Hier soir, c’était censé être un petit plaisir : des burgers maison, préparés avec amour pendant la sieste des enfants. J’avais hâte de m’asseoir et de savourer ce moment. Mais Antoine a tout gâché en une phrase.

Après le dîner, il est venu me trouver dans la salle de bains pendant que je brossais les dents des enfants.

— Claire, tu sais que je t’aime… mais tu pourrais faire un effort. Pour ta santé… et pour nous.

J’ai serré la brosse à dents si fort que j’ai cru qu’elle allait casser.

— Tu crois que j’ai le temps de penser à moi ? Tu crois que c’est facile ?

Il a soupiré.

— Tout le monde y arrive… Regarde ta sœur, elle a perdu ses kilos après son deuxième enfant.

J’ai eu envie de hurler. Ma sœur n’a pas trois enfants rapprochés. Elle n’a pas un mari qui rentre à 21h tous les soirs en laissant tout sur mes épaules.

Je n’ai rien dit. J’ai fini la routine du soir comme un robot.

Quand j’ai enfin pu m’asseoir sur le lit, Antoine est venu s’allonger à côté de moi.

— Je veux juste que tu sois heureuse…

J’ai éclaté en sanglots silencieux. Heureuse ? Comment pourrais-je l’être si même dans ma propre maison je dois me justifier pour chaque bouchée ?

Ce matin, j’ai croisé le regard de Ruby alors qu’elle tartinait sa confiture.

— Maman, pourquoi papa t’a grondée hier ?

J’ai senti mes yeux piquer.

— Parfois les grands ne sont pas d’accord… Mais ce n’est pas grave.

Mais si, c’est grave. Parce qu’à force d’entendre qu’on doit être mince pour être aimée, nos filles grandissent avec des complexes qui ne leur appartiennent pas.

J’ai repensé à ma propre mère qui passait son temps à compter ses calories et à se peser chaque matin devant moi et ma sœur. Je m’étais juré de ne jamais faire subir ça à mes enfants.

Mais voilà où j’en suis : humiliée devant eux par l’homme qui est censé m’aimer sans condition.

Ce soir-là, après avoir couché Lily, je me suis assise seule dans la cuisine. J’ai pris un carnet et j’ai écrit :

« Est-ce que je dois vraiment changer pour être aimée ? Est-ce que mon corps est devenu un champ de bataille où chacun peut donner son avis ? »

Je n’ai pas toutes les réponses. Mais je sais une chose : je ne veux plus avoir honte d’avoir faim. Je ne veux plus cacher mon assiette ou compter mes bouchées sous le regard des autres.

Alors dites-moi… Est-ce qu’on doit vraiment se sacrifier pour plaire ? Est-ce qu’on peut encore s’aimer soi-même quand ceux qu’on aime nous jugent sans cesse ?